Reflection disponible en français ci-dessous

Goma, February 22nd, 2025

The Katindo military camp in Goma housed many families of soldiers of the Armed Forces of the Democratic Republic of Congo (FARDC). Following violent fighting in the heart of Goma from January 26 to 29, 2025, this city fell into the hands of M23-AFC rebel forces supported by the Rwanda Defense Forces (FDR). The new authorities of Goma took a series of measures including:

  • The dismantling of camps for displaced people in and around Goma and forcing them to return to their home villages;
  • The surrender of defeated FARDC soldiers, via MONUSCO or by regrouping at the Goma stadium from where their evacuation was organized according to a deadline set by the new urban authorities;
  • The dismantling of Katindo military camp which hosted several families of FARDC soldiers.

Many FARDC soldiers died in the fighting, leaving widows and orphans at Katindo camp in Goma and in other DRC provinces; other soldiers had withdrawn from combat and taken various directions; some went to Rwanda, others to Bukavu and elsewhere, still others had disguised themselves as civilians and remained in hiding at Katindo Camp and in other neighborhoods of Goma.

Let’s note that apart from the dead, the other soldiers carried their weapons everywhere. This presaged two armies in the same city of Goma. To compensate for this, the new authorities dismantled Katindo military camp, throwing the families of FARDC soldiers onto the streets. These families (women and children) had temporarily found refuge in school buildings and churches including the Catholic church of Notre Dame de Pères Carmes parish.

Their living conditions were deteriorating day by day, no latrines, no food, no water, promiscuity of space for women, boys, disabled soldiers and those disguised as civilians. To add insult to injury, the crime rate (armed robbery, kidnapping, killings) is increasing in Goma these days. On February 18 to 19, 2025 at night, nine armed bandits were killed flagrantly.

Yesterday at 9:00 p.m. while I was writing this document, a young neighbor was shot dead by three criminals as he was returning home. They ran away after. We were all shocked but helpless. And it happens like this every night in other quarters in Goma. In addition to the escapees from Munzenze prison, estimated at more than 4,000 prisoners, the suspicion of these crimes weighs on soldiers disguised as civilians who shared accommodation with families evicted from the camp and housed in schools and churches.

On the one hand, as Goma pupils are resuming school, their heads are pleading for military families to vacate the classrooms and on the other hand the rise in crime has reached its peak in Goma city. Every night is a crackling of bullets all over the city. To try to restore security, the new authorities launched closures targeting the most suspicious locations. Four days ago, these authorities raided Notre Dame du Mont Carmel Parish and caught almost all the soldiers disguised as civilians, and these families were forced to vacate the classrooms and the church they occupied. The eviction of schools continues everywhere in anticipation of the resumption of classes.

These families (women, children and disabled soldiers) are thrown into the streets without any support. Unlike the displaced people forced to return to their villages and eventually recover their fields and huts, these military families have neither house nor physical address. In the configuration of the national army, recruitment and deployment of soldiers takes place across the entire extent of DRC and often thousands of km from the village of origin.

It is when these soldiers’ wives moan that we understand that they came either from Lubumbashi more
than 800km from Goma, from Matadi more than 2800km, from Kananga more than 1500km, from Gemena more than 1600km and so on. They do not hope to return to their native villages because for these days there are no planes, no trains, no boats and roads are almost impassable. It is when a woman moans that we understand she is a widow and her husband’s body is still lying in the morgue, or she has no news of her husband, or her husband is a war invalid but she has kids to care of.

Worse still, being in this part controlled by the rebellion, these women, heads of households do not have access to their husbands’ salaries, all the banks being closed. They are then vulnerable people left behind, condemned to wandering, without a home, without a salary, without access to health care, without funeral expenses and without schooling for their children either. The plight of these people is a harmful impact of today’s war. However, in its preamble, the Universal Declaration of Human Rights evokes the inherent dignity of all members of the human family and everyone has the right to life and protection without distinction.

by Marhegane Godefroid.


Des laissés-pour-compte très vulnérables, et les  familles des militaires FARDC à Goma

Goma, le 22 février 2025

Le camp militaire de Katindo à Goma abritait de nombreuses familles de militaires de Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC). A l’issue de violents combats en plein cœur de Goma du 26 au 29 janvier 2025, cette ville est tombée aux mains des forces rebelles M23-AFC soutenus par FDR= Forces de Défense du Rwanda. Les nouveaux maîtres de Goma ont pris une série des mesures parmi lesquelles :

  • Le démantèlement de camps des déplacés dans et autour de la ville de Goma et les contraindre à retourner dans leurs villages de provenance;
  • La reddition des militaires FARDC vaincus, via MONUSCO ou en se regroupant au stade de l’unité de Goma d’où leur évacuation a été organisée selon un délai fixé par les nouvelles autorités urbaines;
  • Le démantèlement du camp militaire de Katindo qui hébergeait plusieurs familles de militaires FARDC.

Beaucoup de FARDC sont morts aux combats laissant des veuves et orphelins au camp Katindo de Goma et dans d’autres provinces en RDC ; d’autres militaires s’étaient retirés de combats et avaient pris diverses directions ; les uns au Rwanda, les autres à Bukavu et ailleurs, d’autres encore s’étaient déguisés en civils et sont restés en clandestinité au camp Katindo et dans d’autres quartiers de Goma.

Notons qu’à part les morts, les autres soldats portaient partout leurs armes. Cela présageait deux armées dans la même ville. Pour y pallier, les nouvelles autorités ont démantelé le camp militaire de Katindo, jetant dans la rue les familles des militaires FARDC. Ces familles (femmes et enfants) ont temporairement trouvé refuge dans des bâtiments scolaires et églises, y compris l’église catholique de la paroisse Notre Dame de Pères Carmes.

Leurs conditions de vie se détérioraient au jour le jour, pas de latrines, pas de vivres, pas d’eau, promiscuité de l’espace pour les femmes, les garçons, les soldats invalides et ceux déguisés en civil. Comble de malheurs, hausse de taux de criminalité (vols mains armées, kidnapping, tueries) à Goma ces jours. La nuit du 18 au 19 février 2025, neuf bandits armés tués en flagrance.

A 21h00 pendant que je rédigeais ce document, un jeune voisin a été fusillé par trois criminels alors qu’il rentrait chez lui. Et ça se passe ainsi chaque nuit dans les autres quartiers à Goma. Outre les évadés de la prison Munzenze estimés à plus de 4000 prisonniers, les présomptions de ces criminalités pèsent sur les militaires déguisés en civils qui partageaient le logement avec les familles déguerpies du camp et logées dans les écoles et les églises.

D’un côté, comme à Goma les élèves reprennent le chemin de l’école, les responsables des écoles plaident pour que les familles de militaires libèrent les salles des classes et de l’autre côté la montée des criminalités a atteint son paroxysme dans la ville de Goma. Chaque nuit les crépitements des balles résonnent un peu partout dans la ville. Pour essayer de rétablir la sécurité, les nouvelles autorités ont lancé des bouclages ciblant les endroits les plus suspects. Il y a quatre jours ces autorités ont quadrillé la paroisse Notre Dame du Mont Carmel et ont attrapé presque tous les militaires déguisés en civil. Et ces familles ont été contraintes de libérer les salles de classe et l’église qu’elles occupaient. Le déguerpissement des écoles se poursuit partout en prévision de la reprise des cours.

Ces familles (femmes, enfants et soldats invalides) sont jetées dans les rues sans aucune prise en charge. Contrairement aux déplacés forcés de retourner dans leurs villages et retrouver éventuellement leurs champs et huttes, ces familles des militaires n’ont ni maison ni adresse physique. Dans la configuration de l’armée nationale, le recrutement et le déploiement des militaires s’opèrent sur toute l’étendue de la RDC et souvent à des milliers de km du village d’origine.

C’est quand ces femmes des militaires gémissent que l’on comprend qu’elles sont venues soit de Lubumbashi à plus 800km de Goma, de Matadi plus de 2800km, du Kananga plus de 1500 km, de Gemena plus 1600km ainsi de suite. Elles n’espèrent pas regagner leurs villages d’origine car ces jours-ci il n’y a ni avion, ni train, ni bateau et les routes sont quasi impraticables. C’est quand une femme gémit que l’on comprend qu’elle est veuve et le corps de son mari traine à la morgue, ou qu’elle n’a pas de nouvelle de son mari, ou que son mari est un invalide de guerre mais elle a des enfants à nourrir.

Pire encore, se trouvant dans cette partie contrôlée par la rébellion, ces femmes cheffes de ménages n’ont pas accès aux salaires de leurs maris, toutes les banques étant fermées. Ce sont alors des vulnérables laissés-pour-compte condamnés à l’errance, sans maison, sans salaire, sans accès aux soins de santé, sans frais funéraires, sans scolarisation des enfants. Le sort de ces personnes est un impact nuisible de la guerre d’aujourd’hui. Or dans son préambule, la déclaration universelle des droits de l’homme évoque la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et tout le monde a droit à la vie et à la protection indistinctement.

par Marhegane Godefroid.